Pour: Mme. Liliane Maury Pasquier
Conseillère aux Etats, Canton de Genève
Cc. Mr. Bernhard Salzmann,
Responsable Communication et Rédaction
Union suisse des arts et métiers
Cc. Hans-Ulrich Bigler, directeur,
Union suisse des arts et métiers
Genève, le 8 août 2013
Chère Madame Maury Pasquier,
Suite aux informations relevées dans les médias, et notamment Le Matin du 29 juillet dernier, concernant les pauses allaitement et le fait que le patronat suisse s’oppose à ce qu’elles soient payées, nous aimerions vous dire, au nom de GIFA (Association genevoise pour l’alimentation infantile) et du réseau international IBFAN (Réseau international des groupes d’action pour l’allaitement infantile) combien nous pensons cette prise de position rétrograde et inopportune. Nous soutenons au contraire votre propre opinion en faveur de pauses payées et vous en félicitons.
Une nette majorité des mères exercent aujourd'hui une activité professionnelle. Par ailleurs, la raison la plus fréquemment avancée par les mères qui cherchent à sevrer leur enfant (trop souvent avant l’âge de 6 mois) est leur retour au travail. Vue la longueur relativement restreinte du congé maternité en Suisse, et afin d’aider les mères à suivre au mieux les recommandations de l’OMS concernant l’allaitement exclusif (6 mois) et la continuation de l'allaitement le plus longtemps possible (2 ans ou plus) tout en menant de front leurs responsabilités professionnelles, les pauses allaitement payées offrent une solution adoptée déjà par plus de 90 pays dans le monde.
Comme vous le savez si bien puisque vous en êtes à l'heureuse initiative, la ratification de la Convention No 183 (2000) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur la protection de la maternité, décidée par les Chambres fédérales en décembre dernier, exige qu’à niveau national il y ait des pauses allaitement et qu’elles soient payées. Nous comprenons donc mal que le patronat puisse s’opposer à une décision déjà prise et que leur opposition puisse obliger à faire marche arrière.
En plus des avantages de l’allaitement pour les mères et les nourrissons, les employeurs aussi ont tout à gagner des pauses allaitement payées. De nombreuses études montrent que de telles mesures réduisent les absences des mères (dont les bébés sont moins souvent et moins longuement malades), les rendent plus fidèles et loyales envers leur employeur (dont elles apprécient le « geste »), augmentent la productivité des travailleuses, diminuent leurs départs et donnent une image moderne et plus avenante de l’entreprise. Et tout cela à un coût très modeste pour l’entreprise.
En outre, une étude récente internationale sur 182 pays a montré qu'un pourcentage plus élevé de femmes pratiquent l'allaitement exclusif dans les pays où les lois garantissent des "pauses allaitement" rémunérées au travail. Pour la Suisse, des pauses allaitement rémunérées augmenteraient donc les chances d'améliorer les statistiques d'allaitement exclusif au niveau national- un objectif de promotion et de prévention de la santé important. La Suisse a aussi ratifié la Convention des Droits de l'Enfant et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Notre pays s'est donc engagé légalement à adopter des mesures spéciales pour promouvoir le soutien communautaire et sur le lieu du travail des femmes enceintes et allaitantes, en accord avec la Convention de l'OIT sur la protection de la maternité.
Nous aimerions joindre nos efforts en faveur des pauses allaitement payées et de la ratification par la Suisse de la Convention 183. Nous serions très intéressées par une éventuelle rencontre pour échanger sur ce sujet d'actualité.
En vous remerciant de votre intérêt nous vous prions de recevoir, Madame, l’expression de
nos salutations les meilleures.
Rebecca Norton
Responsable GIFA du projet genevois de promotion de l'allaitement dans le cadre de la
stratégie de prévention de l'obésité et la campagne "Marchez mangez malin" du DARES
Elaine Petitat
Responsable GIFA-IBFAN pour la protection de la maternité au travail et responsable de la contribution GIFA-IBFAN au kit de ressources OIT 2012 sur la protection de la maternité, en collaboration avec l'UNICEF, l'OMS, les CFF, l'ONU Femmes et l'UNFPA